La France s’apprête à
légaliser le délit d’opinion

Vous êtes favorable au clonage reproductif ? Vous jugez souhaitable que les parents choisissent dès que possible certaines caractéristiques de leurs enfants ? Si vous avez le malheur d’être Français, il pourrait vous en coûter 3 ans d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende. Telle est l’une des nombreuses dispositions totalitaires du projet de loi bio-éthique. Après le libre-usage du corps, c’est la liberté de pensée qui est visée. Tout cela au pays des droits de l’homme…

La création précipitée d’un “ crime contre l’espèce humaine ” ne suffit apparemment pas à calmer l’ardeur répressive du législateur français. Non content de condamner l’eugénisme et le clonage reproductif à l’égal des crimes nazis, le projet de loi bio-éthique franchit un pas supplémentaire en créant un véritable délit d’opinion : le simple fait de se déclarer favorable au clonage ou à la sélection de certaines qualités sera désormais passible de 3 ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende !

On peut légitimement être opposé au clonage reproductif et au choix de certaines caractéristiques de l’enfant à naître. Est-ce une raison suffisante pour priver de leur liberté de parole les personnes qui y sont favorables ? En quoi les convictions de quelques-uns, alimentées pour l’essentiel par des considérations religieuses, devraient-elles s’imposer à tous et tuer dans l’œuf tout débat ? En quoi est-il criminel de souhaiter que des couples stériles puissent devenir parents grâce à une nouvelle technique médicale, pourvu que celle-ci soit assez sûre ? En quoi est-il criminel de souhaiter que les futurs parents puissent tous bénéficier des progrès de la science, notamment du dépistage précoce des caractéristiques génétiques de leur enfant à naître ? Cette disposition de la loi est évidemment contraire à nos principes constitutionnels comme à nos engagements européens en matière de droit de l’homme.

Contrairement à certains inspirateurs du projet de loi, les Mutants ne cachent rien de leurs idées. Nous sommes favorables aux progrès de la connaissance et à leur application à l’espèce humaine, notamment en matière de procréation. Nous sommes défavorables aux dogmes religieux ayant ensanglanté le monde et emprisonné l’esprit depuis deux mille ans. Mais le problème ne se situe pas là. Dans une démocratie moderne, par nature pluraliste, l’Etat est neutre sur le plan des valeurs et des finalités. Il ne défend pas une conception particulière du bien, mais la possibilité pour chaque individu de défendre sa conception particulière du bien dans le respect de celle des autres. Le projet de loi bio-éthique rompt avec ce principe. Il représente à ce titre une régression antidémocratique. Il est nécessaire d’en abroger les dispositions les plus dangereuses pour la liberté des individus et pour les progrès de la science.

 



Le texte exact des lois de bioéthique

La nouvelle loi de bioéthique transmise par le Sénat à l’Assemblée nationale le 31 janvier 2003, en vue de sa deuxième lecture et de son vote définitif les 9, 10 et 11 décembre 2003, stipule notamment :

Article 21 bis A (nouveau)

Après l'article 511-1 du code pénal, il est inséré un article 511-1-2 ainsi rédigé :

“ Art. 511-1-2. - Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende le fait, par don, promesse, menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir, de provoquer autrui à se prêter à un prélèvement de cellules ou de gamètes, dans le but de faire naître un enfant génétiquement identique à toute autre personne, vivante ou décédée.

“ Est punie des mêmes peines la propagande ou la publicité, quel qu'en soit le mode, en faveur de l'eugénisme ou du clonage reproductif. ”